Notre corps nous même
s'émanciper des normes
« Contrairement à ce qui nous est demandé, notre corps ne peut pas être constamment en forme, beau, maigre, épilé, désirant, sans carence ni hématome. Il a des coups de pompe, des baisses et des montées d’hormones, des addictions. Il est parfois blessé. Notre corps doit pouvoir reprendre son souffle. Il nous appartient, il est notre meilleur instrument : nous le voulons en bonne santé, capable de se défendre, et libre. » Le collectif Notre corps, nous-mêmes s’est formé en 2016 dans le but de réactualiser le livre du même nom paru en 1977. Notre corps, nous-mêmes est un manuel de santé féministe, forgé à partir de nos expériences et des paroles de plus de 400 femmes cisgenres, et de quelques personnes trans et nonbinaires, qui ont accepté de nous confier leurs vécus, leurs analyses, leurs ressources ou stratégies pour se défendre, s’émanciper et se réapproprier leur corps.
Temps de lecture : ~ 27 minutes
Toxicophobie mon amour
« Un des principaux effets de la toxicophobie est de faire éprouver aux toxicomanes une honte incroyablement tenace. Honte d’être ce qu’iel est. Tellement tenace que même au pied du mur, ce·tte dernier·e peut toujours nier sa consommation plutôt que d’avouer quelque chose d’aussi honteux aux yeux de la société. Pas facile dans ces conditions de mettre en place un parcours de soin efficace ou même de l’information sur la réduction des risques. Ça a au moins une conséquence et s’il n’y en a qu’une seule que vous devez retenir, c’est celle-ci : la toxicophobie tue. »
Temps de lecture : ~ 15 minutes
Dorothy Allison
une question de classe
« J’ai grandi dans la pauvreté, la haine, victime de violence physiques, psychologiques et sexuelles, et je sais que souffrir ne rend pas noble. Ça détruit. Pour résister à la destruction, à la haine de soi ou au désespoir à vie, nous devons nous débarrasser de la condition de méprisé·e, de la peur de devenir le eux dont ils parlent avec tant de mépris. Nous devons refuser les mythes mensongers et les morales faciles. Nous devons nous voir nousmêmes comme des êtres humains, avec des défauts, et extraordinaires. Nous tou·tes – extraordinaires. » Dorothy Allison est écrivaine, militante féministe lesbienne. Elle est notamment l’autrice de « L’histoire de Bone » (Éditions 10/18, Paris, 1999) et « Retour à Cayro » (Éditions Belfond, Paris, 1999)
Temps de lecture : ~ 54 minutes
Olivier Le Cour Grandmaison
Coloniser exterminer
« Pendant que l’on débat longuement en France sur la nature des peines et les moyens de les rendre moins affligeantes pour les corps, les « indigènes » continuent d’être suppliciés en public, qu’ils soient vivants ou morts, civils ou combattants. Des années 1840 à l’indépendance, en 1962, le corps physique de l’« Arabe » a donc été utilisé comme un instrument de terreur sur lequel le pouvoir colonial n’a cessé d’inscrire les marques de sa toute-puissance. La torture en Algérie et dans l’empire français : une exception limitée aux guerres de libération nationale conduites contre la métropole ? Non, la règle. » Olivier Le Cour Grandmaison est un politologue français né le 19 septembre 1960 à Paris. Spécialisé dans les questions de citoyenneté sous la Révolution française et dans les questions qui ont trait à l'histoire coloniale, il est maître de conférences en science politique à l'université d'Evry-Val d'Essonne et enseigne au Collège international de philosophie.
Temps de lecture : ~ 54 minutes
Comme un chien enragé
« Je suis actuellement incarcéré en détention préventive à la prison de la Santé, à Paris. J’espère ici réussir à donner un bon aperçu de cette vie de chien, une plongée en apnée dans l’univers carcéral. Je suis pour la destruction totale de tous les lieux d’enfermement quels qu’ils soient, et avant mon incarcération, je participais déjà aux luttes anticarcérales et <avais donc développé un certain intérêt pour la condition du prisonnier, et pourtant la prison telle que je la vis aujourd’hui est assez éloignée de la façon dont je pouvais me la représenter concrètement vue de l’extérieur. »
Temps de lecture : ~ 31 minutes
chronique du pied de biche
"Chroniques du pied de biche" ouvre une porte subjective sur les squats et ce qui les traverse. Il se fait l’écho de petites et grandes aventures, de résistances, d’émotions, rencontres et transformations du rapport au monde, cueillies à travers plus d’une décennie d’occupations...
Temps de lecture : ~ 23 minutes
Stig Dagerman
Notre besoin de consolation est impossible a rassasier
« Je suis dépourvu de foi et ne puis donc être heureux, car un homme qui risque de craindre que sa vie soit une errance absurde vers une mort certaine ne peut être heureux. Je n’ai reçu en héritage ni dieu, ni point fixe sur la terre d’où je puisse attirer l’attention d’un dieu : on ne m’a pas non plus légué la fureur bien déguisée du sceptique, les ruses de Sioux du rationaliste ou la candeur ardente de l’athée. Je n’ose donc jeter la pierre ni à celle qui croit en des choses qui ne m’inspirent que le doute, ni à celui qui cultive son doute comme si celui-ci n’était pas, lui aussi, entouré de ténèbres. Cette pierre m’atteindrait moi-même car je suis bien certain d’une chose : le besoin de consolation que connaît l’être humain est impossible à rassasier. » Stig Dagerman, né Stig Halvard Jansson, le 5 octobre 1923 à Älvkarleby, et mort le 4 novembre 1954 à Danderyd, est un écrivain et journaliste libertaire suédois. Il est l'un des écrivains suédois les plus importants des années 1940. De 1945 à 1949, il publie, avec un succès considérable, un grand nombre d'œuvres littéraires et journalistiques. Puis soudain, et sans raison connue, il cesse d'écrire. Il se suicide à l'automne 1954.
Temps de lecture : ~ 13 minutes
Francois Cusset
Au Chiapas la révolution s'obstine
Au début des années 1990, le soulèvement zapatiste incarnait une option stratégique : changer le monde sans prendre le pouvoir. Une lutte indigène et anti-capitaliste, une organisation du pouvoir à la fois horizontale et verticale, visant l’autogouvernement et l’élaboration de solidarités entre les luttes des cinq continents...
Temps de lecture : ~ 23 minutes
Autobiographie d'un corps trans
« C’est l’histoire d’histoires, de réflexions, de discussions qui ont marqué et rythmé ma transition FTM (female to male). C’est le récit de la rage d’avoir été une meuf dans ce monde de merde. C’est ma stratégie pour m’en sortir. » Leslie Feinberg (1949-2014) est une auteur⋅ice américain⋅e lesbienne butch transgenre, militant⋅e communiste, antiraciste et pour les droits des personnes transgenres. Ielle est notamment l’auteur⋅ice de Stone Butch Blues
Temps de lecture : ~ 26 minutes
Leslie Feinberg
nous sommes toutes en devenir
« Nous sommes un mouvement de femmes biologiques masculines, d’hommes biologiques féminins, de cross-dressers, d’hommes et de femmes trans, d’intersexes qui sommes né⋅es dans ce large intervalle qu’il y a anatomiquement entre femelle et mâle biologiques, de genderblenders, de beaucoup d’autres variant⋅es de sexe et de genre, et d’autres définitions qui nous sont importantes. En somme, nous élargissons la vision du nombre de manières qu’il y a d’être humain⋅e. (...) Pour beaucoup d’entre nous, les mots femme et homme, m’dame ou m’sieur, elle ou il – en euxmêmes comme d’eux-mêmes – ne complètent ni la somme de nos identités, ni celle de nos oppressions. Pour ce qui est de moi, ma vie ne devient visible que lorsqu’on ajoute à l’équation le mot transgenre. » Leslie Feinberg (1949-2014) est une auteur⋅ice américain⋅e lesbienne butch transgenre,
Temps de lecture : ~ 21 minutes
Corinne Monnet
A propos d'autonomie d'amitié sexuel et d'heterosexualite
"L’Amour, l’Amitié, le Désir Présentation du cadre de la non-monogamie responsable L’amour exclusif Le paradigme de l’amitié La réunion de l’amitié et du désir Amour et hétérosexualité. Point de vue féministe Pascale Noizet et la fonction de l’amour dans l’hétérosexualité Pour une pratique hétérosexuelle féministe Corinne Monnet, féministe radicale, est active depuis plusieurs années dans la mouvance anarchiste et a contribué à plusieurs initiatives féministes non-mixtes."
Temps de lecture : ~ 54 minutes
bell hooks
comprendre le patriarcat
Gloria Jean Watkins1, connue sous son nom de plume bell hooks, née le 25 septembre 1952, est une intellectuelle, féministe, et militante des États-Unis. Elle s’intéresse particulièrement aux relations existantes entre race, classe et genre, et sur la production et la perpétuation des systèmes d’oppression et de domination se basant sur eux. Elle a publié plus de trente livres et plusieurs articles dans des publications universitaires ou dans la presse généraliste, elle est apparue dans plusieurs films documentaires, et a participé à des conférences publiques. Principalement à partir d’une perspective féministe et afro-américaine, hooks traite de la race, de la classe et du genre dans l’éducation, l’art, l’histoire, la sexualité, les médias de masse, et le féminisme. Dans ce texte, extrait de son livre The Will to Change : Men, Masculinity, and Love, bell hooks parle de son expérience personnelle du patriarcat, notamment dans son enfance, puis de comment il affecte les femmes et les hommes.
Temps de lecture : ~ 26 minutes
Elles sont reloues ces feministes
Pourquoi ce titre ? Parce que j’étais de ces gens qui le pensent. Je me sentais agressée dès que le sujet était abordé, et pour les plus affirmées, j’aurais juré qu’elles se faisaient griller des verges au barbecue l’été venu. Moi qui ai toujours été entourée d’hommes et me sens si proche d’eux, j’avais l’impression de devoir mettre tout mon passé, mon entourage et mes références au placard, l’impression qu’on balançait une bombe dans ma meute. Et puis j’ai fini par comprendre de quoi il était question, grâce à l’un de mes compagnons (féministe convaincu et surtout, patient) j’ai fini par m’ouvrir… Les choses me sont apparues les unes après les autres, comme un petit bout de ficelle tiré par inadvertance. Aujourd’hui ce bout de ficelle est devenu une pelote, que je continue de démêler jour après jour. Impossible désormais de faire marche arrière, car la qualité de vie et de relations que m’a apporté cette ouverture d’esprit dépasse de loin tout ce que j’ai pu connaître jusqu’ici. Nos façons de se relationner (dans l’intimité et en dehors) constituent selon moi l’un des piliers fondamentaux de notre construction sociale. Je souhaiterais, à travers ce texte, briser le silence et tendre ce petit bout de ficelle à celles et ceux qui nient encore la réalité des faits, ralentissant les améliorations possibles dans nos sociétés et dans nos vies, en tant que femme et en tant qu’homme, se privant ainsi d’une qualité de vie et de liberté qui n’a pas son égal.
Temps de lecture : ~ 55 minutes
L’anthroposophie, discrète multinationale de l’ésotérisme
Quoi de commun entre l’agriculture biodynamique, une école à la pédagogie atypique, une grande entreprise de cosmétiques, un investissement dans une ferme éolienne ? Tous sont liés à l’anthroposophie, un courant spirituel fondé au début du XXe siècle par Rudolf Steiner. Discret mais influent, ce mouvement international dispose de relais économiques et politiques… jusqu’au sein du gouvernement français.
Temps de lecture : ~ 38 minutes
Mathieu Rigouste
L’ordre sécuritaire et le soulèvement des quartiers populaires
– Le néocolonialisme et la société postcoloniale – De la bataille d’Alger à la bataille de Villiers-le-Bel – Une contre-insurrection médiatico-policière – Il faut sacrifier des boucs émissaires – Expérimentation, démonstration et commerce des techniques de provocation/répression – Les points de rupture de la machinerie sécuritaire – Maintenant il faut s’organiser « J’ai vécu 25 ans à Gennevilliers, banlieue populaire de Paris où quelques cités servent de terrains de chasse à la police. J’y ai vu l’oppression quotidienne, la misère et la ségrégation. J’y ai aussi appris l’entraide, la solidarité et l’espoir. Depuis dix ans j’enquête sur les méthodes de répression et le développement du système sécuritaire, je recueille aussi la parole de ceux qui s’y affrontent. J’ai vu les Uteq à Villiers-le-Bel quelques après-midi de juin 2009, j’y ai écouté ce qu’on voulait bien me raconter de la bataille, j’ai assisté au procès exactement un an plus tard et recueilli toutes les sources qui pouvaient permettre de décortiquer la mécanique qui s’est abattue sur celles et ceux de Villiers-le-Bel. » — Mathieu Rigouste
Temps de lecture : ~ 45 minutes
Virginie Despentes
Rien ne me separe de la merde qui m'entoure
"« Il est temps de se soustraire aux évidences. Le monde tel qu’on le connaissait s’écroule : ce n’est pas une mauvaise nouvelle, c’est le moment de se souvenir ‘on n’est pas obligés pour les armes, on n’est pas obligés pour la guerre, on n’est pas obligés pour la destruction des ressources, on n’est pas obligés de tenir compte des marchés, le patriarcat est une narration et elle a fait son temps’. Terminé de passer nos vies à quatre pattes sous les tables de vos festins, à grignoter vos restes et sucer vos bites à l’aveugle, gratuitement, aimablement, en remerciant abondamment à chaque éjaculation – ça nous fait tellement plaisir de vous voir heureux vous qui êtes à table. Terminé. Maintenant quand on ouvre la bouche c’est pour mordre, ou pour parler. » Virginie Despentes est une écrivaine et réalisatrice française, féministe et figure de la communauté lesbienne. Elle est notamment l’autrice de King kong théorie, Apocalypse baby, et réalisatrice du film Baise-moi..."
Temps de lecture : ~ 19 minutes
treize minutes
A 21h20, comme prévu, le tic-tac de l’horloge de Georg Elser cessa de battre. Dans un terrible fracas, la colonne située derrière la scène se brisa, faisant s’écrouler tout le balcon qu’elle soutenait ainsi que le toit, en dévastant le local. Une pluie de débris de bois, de briques et d’acier s’abattit sur la scène en la pulvérisant complètement.
Temps de lecture : ~ 19 minutes