S·edition est un infokiosque proposant des brochures au format A6. Les textes édités existent parfois au format A5 plus classique, et dans ce cas, ils sont souvent accessibles sur le site Infokiosque.net.
Les textes proposées ici n’appartienent pas à un “courant” de pensée ou une idéologie en particulier; mais ont ceci de commun qu’ils interrogent et dénoncent différents systèmes d’oppressions (économique, étatique, patriarcal, raciste, colonial…), ou proposent des pistes de réflexions pour y résister.
Leslie Feinberg
nous sommes toutes en devenir
« Nous sommes un mouvement de femmes biologiques masculines, d’hommes biologiques féminins, de cross-dressers, d’hommes et de femmes trans, d’intersexes qui sommes né⋅es dans ce large intervalle qu’il y a anatomiquement entre femelle et mâle biologiques, de genderblenders, de beaucoup d’autres variant⋅es de sexe et de genre, et d’autres définitions qui nous sont importantes. En somme, nous élargissons la vision du nombre de manières qu’il y a d’être humain⋅e. (...) Pour beaucoup d’entre nous, les mots femme et homme, m’dame ou m’sieur, elle ou il – en euxmêmes comme d’eux-mêmes – ne complètent ni la somme de nos identités, ni celle de nos oppressions. Pour ce qui est de moi, ma vie ne devient visible que lorsqu’on ajoute à l’équation le mot transgenre. » Leslie Feinberg (1949-2014) est une auteur⋅ice américain⋅e lesbienne butch transgenre,
Temps de lecture : ~ 21 minutes
Leslie Feinberg
le mouvement de liberation transgenre
Le genre : une définition de soi, pas une anatomie • Le transgendérisme bouffe l’oppression • C’est le « passing » qui est nouveau • « Elle est un homme » • Pourquoi une telle haine ? • Comment le naturel cesse de l’être • Le calvaire des transgenres • Les transgenres dans le monde • Le passing comme condition de survie • Comment le capitalisme se sert des vieux préjugés • Des vies rendues invisibles • De Jeanne d’Arc à Stonewall • Combattre pour un monde meilleur Leslie Feinberg (1949-2014) est une auteur⋅ice américain⋅e lesbienne butch transgenre, militant⋅e communiste, antiraciste et pour les droits des personnes transgenres. Ielle est notamment l’auteur⋅ice de Stone Butch Blues
Temps de lecture : ~ 29 minutes
Babeuf
Le manifeste des plebeiens
François Noël Babeuf, connu sous le nom de Gracchus Babeuf (le prénom romain de Gracchus évoque le partage des terres et la répartition égalitaire des biens), né le 23 novembre 1760 à Saint-Quentin et mort guillotiné à Vendôme le 27 mai 1797, est un révolutionnaire français. Il forma la « conjuration des Égaux » contre le Directoire et fut exécuté. Ses idées inspirent un courant de pensée, le « babouvisme », qui préfigure le communisme et l'anarchisme. En 1795, Babeuf sort de la prison où l’a conduit le soupçon qu’il préparait une insurrection. Il relance immédiatement son journal, Le Tribun du peuple, où il attaque le tout nouveau Directoire tout en réclamant la mise en œuvre de la Constitution de 1793. Ce qui lui vaut les insultes et accusations de Joseph Fouché, l’un des artisans de la chute de Robespierre et futur ministre de la police pour Napoléon. Avec ce Manifeste, Babeuf répond à ceux qui le traitent de « forcené populacier » et d’allié objectif de la contre-révolution. Il en appelle à une concrétisation de l’égalité de droit passant par la suppression de la propriété particulière : « Tout ce qu’on a au-dessus de la suffisance est le résultat d’un vol. » Le propos sera très bien compris : Babeuf est exécuté en 1797.
Temps de lecture : ~ 26 minutes
Kropotkine
L’Organisation de la Vindicte appelée Justice
« La vindicte populaire organisée, appelée Justice, est une survivance d’un passé de servitude, développé d’une part par les intérêts des classes privilégiées et d’autre part par les idées du droit romain et celles de vengeance divine qui font tout aussi bien l’essence du christianisme que ses idées de pardon et sa négation de la vengeance humaine. Issue d’un passé de servage économique, politique et intellectuel, cette institution sert à le perpétuer. Elle sert à maintenir dans la société l’idée de vengeance obligatoire, érigée en vertu. Elle sert d’école de passions antisociales dans les prisons. Elle déverse dans la société un flot de dépravations qui suinte autour des tribunaux et des geôles par le policier, le bourreau, le mouchard, l’agent provocateur, les bureaux pour la moucharderie privée, etc, – ce flot grandissant tous les jours. Le mal excède en tout cas le bien que la justice est supposée accomplir par la menace de punition. » Kropotkine (1842-1921), aristocrate d’origine russe, fut officier en Sibérie, explorateur, scientifique, et l’un des plus important théoricien et vulgarisateur de la pensée anarchiste.
Temps de lecture : ~ 20 minutes
Said Bouamama
Comprendre et combattre le fascime et la fascisation
Le 24 octobre 2009 à Paris, au Centre International de Culture Populaire, je donnait une conférence sur le fascisme dans le cadre d’un cycle de formations marxistes. Plus de 10 ans après le média en ligne antifasciste « ACTA » me demandait de l’actualiser pour son site qui le publia le 27 mars 2021 avec l’introduction suivante : Nous avons tenu à retranscrire son contenu, tant il nous paraît d’une actualité brûlante, dans un contexte où le fascisme structure une part de plus en plus importante du champ politique français. Cette formation nous semble essentielle pour les nouvelles générations antifascistes qui s’engagent dans une séquence où le fascisme va être un sujet et un objet de lutte central (notamment dans la perspective des élections présidentielles à venir). Le fascisme peut prendre différentes formes et pour le démasquer, en comprendre le but, et le combattre de manière efficace, la théorie marxiste fournit des outils indispensables. Saïd Bouamama est sociologue et militant du FUIQP (Front uni des immigrations et des quartiers populaires)
Temps de lecture : ~ 44 minutes
Olivier Razac
contre l'abolitionnisme
« Après des études de philosophie à l’Université Paris 8 dans les années 90 et une période de production d’essais de philosophie politique sur des objets contemporains (le barbelé et la délimitation de l’espace, le zoo et le spectacle de la réalité, la médecine et la « grande santé »). J’ai travaillé pendant huit ans comme enseignantchercheur au sein de l’Administration Pénitentiaire. C’est dans cette institution disciplinaire que j’ai compris ce que pouvait signifier pour moi la pratique de la philosophie, c’est-à-dire une critique des rationalités de gouvernement à partir des pratiques et dans une perspective résolument anti-autoritaire. Depuis 2014, j’ai intégré l’université de Grenoble comme maître de conférences en philosophie. Je travaille sur la question de l’autorité politique, sur les notions de société du spectacle et de société du contrôle. J’essaie également de porter, avec les étudiants, des projets de philosophie appliquée déconstruisant les pratiques de pouvoir. Enfin, nous tentons de faire vivre un réseau de « philosophie plébéienne », anti-patricienne donc, mais aussi en recherche de relations avec tous nos camarades artisans de la critique sociale. » — Olivier Razac
Temps de lecture : ~ 29 minutes
Peter Gelderloos
la non violence est inefficace
La grande majorité des mouvements sociaux et écologistes échouent lamentablement, depuis des décennies, ne serait-ce qu'à freiner la catastrophe sociale et écologique en cours (de la sixième extinction de masse aux inégalités économiques phénoménales et croissantes qui caractérisent notre temps). La plupart de ces mouvements se targuent de respecter scrupuleusement les principes de la non-violence, qu'ils considèrent comme la seule méthode de lutte acceptable. Et pourtant, ainsi que Peter Gelderloos l'expose dans ce texte, cette adhérence dogmatique au concept de la non-violence est injustifiée et injustifiable. Peter Gelderloos démystifie ici les figures historiques inexorablement citées par la majorité de ceux qui défendent la non-violence comme un absolu Gandhi, Martin Luther King, Nelson Mandela – et expose les réalités complexes derrière leurs accomplissements (souvent réduites à des simplismes mensongers) Ce texte constitue le premier chapitre du livre Comment la non-violence protège l’État : Essai sur l'inefficacité des mouvements sociaux. Il est suivi de quelques citations extraite du livre L’échec de la non-violence. Peter Gelderloos, né en 1982 à Morristown, est un philosophe libertaire, activiste et théoricien anarchiste américain.
Temps de lecture : ~ 36 minutes
Hazel Croft
Pour une approche politique de la sante mentale
« Une approche sociale nous permet de voir que la santé mentale est centrale dans toutes les dimensions de notre vie, et qu’elle est liée à toutes les batailles que nous avons à mener – contre le racisme et le sexisme, pour la libération sexuelle, pour un logement décent, ou dans nos luttes sur nos lieux de travail contre le travail précaire et les tentatives de nous faire travailler plus longtemps et de façon plus intensive. Notre lutte se fait avec les travailleuses/ eurs de la santé mentale, avec les usager.e.s et avec d’autres. Oui, nous devons défendre les services de santé, mais nous devons aussi chercher à conceptualiser la santé mentale d’une manière qui soit libératrice et qui ne nous réduise pas à nos corps biologiques ou à des unités que l’on mesure à l’aune du « bonheur ». Hazel Croft est historienne, écrivaine et militante communiste.
Temps de lecture : ~ 34 minutes
Jo Freeman
La tyranie de l'absence de structure
Jo Freeman (Joreen Freeman), née le 26 août 1945 est une avocate, essayiste, politologue et militante féministe américaine En mai 1970, prononce une conférence au cours de laquelle elle met en lumière certains des écueils auxquels se heurtent les collectifs soucieux de s’émanciper des structures hiérarchiques associées aux partis traditionnels.
Temps de lecture : ~ 34 minutes
Les violences conjugales
« Le couple hétéronormé est le bastion de la violence machiste. En son sein se perpétuent les mécanismes de la domination masculine, bien à l’abri derrière la frontière de l’intime. Si nous voulons changer les rapports sexistes qui sous-tendent tout notre système social, nous devons nous montrer particulièrement attentifs/ves à ce qui se cache dans le « privé ». Parce que nous sommes tou-te-s imprégné-e-s des constructions sociales qui font de nous des hommes ou des femmes, nous les reproduisons tou-te-s. A chacun-e de nous d’accepter de les regarder, de les remettre en cause dans nos propres relations comme dans celles de notre entourage. »
Temps de lecture : ~ 21 minutes
Corinne Monnet
A propos d'autonomie d'amitié sexuel et d'heterosexualite
"L’Amour, l’Amitié, le Désir Présentation du cadre de la non-monogamie responsable L’amour exclusif Le paradigme de l’amitié La réunion de l’amitié et du désir Amour et hétérosexualité. Point de vue féministe Pascale Noizet et la fonction de l’amour dans l’hétérosexualité Pour une pratique hétérosexuelle féministe Corinne Monnet, féministe radicale, est active depuis plusieurs années dans la mouvance anarchiste et a contribué à plusieurs initiatives féministes non-mixtes."
Temps de lecture : ~ 54 minutes
Bob Black
Abolir le Travail
Bob Black, né à Détroit le 4 janvier 1951, est un anarchiste américain, principalement connu pour ce livre L'Abolition du travail. Ce livre, L'Abolition du travail (ou Travailler, moi ? Jamais !), de 1985, a été traduit dans sept langues. La première traduction en français fut pour la revue Interrogations en 1990. Il y définit en quoi le travail est un crime contre l’humanité en lui-même ou à travers ses conséquences. Pour l’abolir, il propose une révolution ludique : « Les employés, enrégimentés toute leur vie, happés par le travail au sortir de l’école et mis entre parenthèses par leur famille à l’âge préscolaire puis à celui de l’hospice, sont accoutumés à la hiérarchie et psychologiquement réduits en esclavage. Leur aptitude à l’autonomie est si atrophiée que leur peur de la liberté est la moins irrationnelle de leurs nombreuses phobies. » Il a participé aussi à l'édition de deux anthologies, l'une de « divagations » (1989), l'autre de diatribes contre le travail (1990). Il a publié, en 2002, Anarchy after Leftism.
Temps de lecture : ~ 38 minutes
Castoriadis
Autogestion et hierarchie
Cornelius Castoriadis (1922-1997) est un philosophe, économiste et psychanalyste grec, fondateur avec Claude Lefort du groupe Socialisme ou barbarie. Il consacra une grande partie de sa réflexion à la notion d'autonomie, par opposition à l'hétéronomie, constitutive selon lui des sociétés religieuses et traditionnelles, des régimes capitalistes mais aussi du régime de l'URSS. Il défendait l’idée d’une révolution en faveur de la démocratie directe et de l’auto-gestion généralisé. Une société sans Etat, ni hiérarchie d’aucune sorte. « Dans la société moderne le système hiérarchique (ou, ce qui revient à peu près au même, bureaucratique) est devenu pratiquement universel. Dès qu’il y a une activité collective quelconque, elle est organisée d’après le principe hiérarchique, et la hiérarchie du commandement et du pouvoir coïncide de plus en plus avec la hiérarchie des salaires et des revenus. De sorte que les gens n’arrivent presque plus à s’imaginer qu’il pourrait en être autrement, et qu’ils pourraient eux-mêmes être quelque chose de défini autrement que par leur place dans la pyramide hiérarchique. »
Temps de lecture : ~ 29 minutes
bell hooks
comprendre le patriarcat
Gloria Jean Watkins1, connue sous son nom de plume bell hooks, née le 25 septembre 1952, est une intellectuelle, féministe, et militante des États-Unis. Elle s’intéresse particulièrement aux relations existantes entre race, classe et genre, et sur la production et la perpétuation des systèmes d’oppression et de domination se basant sur eux. Elle a publié plus de trente livres et plusieurs articles dans des publications universitaires ou dans la presse généraliste, elle est apparue dans plusieurs films documentaires, et a participé à des conférences publiques. Principalement à partir d’une perspective féministe et afro-américaine, hooks traite de la race, de la classe et du genre dans l’éducation, l’art, l’histoire, la sexualité, les médias de masse, et le féminisme. Dans ce texte, extrait de son livre The Will to Change : Men, Masculinity, and Love, bell hooks parle de son expérience personnelle du patriarcat, notamment dans son enfance, puis de comment il affecte les femmes et les hommes.
Temps de lecture : ~ 26 minutes
Aime Cesaire
Discours sur le Colonialisme
« il vaudrait la peine d’étudier, cliniquement, dans le détail, les démarches d’Hitler et de l’hitlérisme et de révéler au très distingué, très humaniste, très chrétien bourgeois du XXe siècle qu’il porte en lui un Hitler qui s’ignore, qu’Hitler l’habite, qu’Hitler est son démon, que s’il le vitupère, c’est par manque de logique, et qu’au fond, ce qu’il ne pardonne pas à Hitler, ce n’est pas le crime en soi, le crime contre l’homme, ce n’est pas l’humiliation de l’homme en soi, c’est le crime contre l’homme blanc, c’est l’humiliation de l’homme blanc, et d’avoir appliqué à l’Europe des procédés colonialistes dont ne relevaient jusqu’ici que les Arabes d’Algérie, les coolies de l’Inde et les nègres d’Afrique. » Aimé Césaire, poète et homme politique, a été maire de Fort de France (1945-2001), et député de la Martinique (1945-1993) ; il a obtenu la départementalisation de la Martinique en 1946. Né en 1913 à la Martinique, il est mort le 17 avril 2008 à Fort-de-France. Il est notamment l’auteur de Cahier d’un retour au pays natal (1939), La tragédie du roi Christophe (1963).
Temps de lecture : ~ 64 minutes
Elles sont reloues ces feministes
Pourquoi ce titre ? Parce que j’étais de ces gens qui le pensent. Je me sentais agressée dès que le sujet était abordé, et pour les plus affirmées, j’aurais juré qu’elles se faisaient griller des verges au barbecue l’été venu. Moi qui ai toujours été entourée d’hommes et me sens si proche d’eux, j’avais l’impression de devoir mettre tout mon passé, mon entourage et mes références au placard, l’impression qu’on balançait une bombe dans ma meute. Et puis j’ai fini par comprendre de quoi il était question, grâce à l’un de mes compagnons (féministe convaincu et surtout, patient) j’ai fini par m’ouvrir… Les choses me sont apparues les unes après les autres, comme un petit bout de ficelle tiré par inadvertance. Aujourd’hui ce bout de ficelle est devenu une pelote, que je continue de démêler jour après jour. Impossible désormais de faire marche arrière, car la qualité de vie et de relations que m’a apporté cette ouverture d’esprit dépasse de loin tout ce que j’ai pu connaître jusqu’ici. Nos façons de se relationner (dans l’intimité et en dehors) constituent selon moi l’un des piliers fondamentaux de notre construction sociale. Je souhaiterais, à travers ce texte, briser le silence et tendre ce petit bout de ficelle à celles et ceux qui nient encore la réalité des faits, ralentissant les améliorations possibles dans nos sociétés et dans nos vies, en tant que femme et en tant qu’homme, se privant ainsi d’une qualité de vie et de liberté qui n’a pas son égal.
Temps de lecture : ~ 55 minutes
Christophe Gentaz
l'homophobie masculine - preservatif psychique de la virilité
« La virilité reste structurée dans ses deux modèles dominants, celui du "chef de famille" et celui du séducteur. Seules les structures superficielles de la virilité ont été ébranlées. Les deux moules n’offrent que très peu d’alternative aux hommes qui voudraient vivre de nouvelles relations sociales avec leurs pairs ou avec l’autre sexe ; les hommes restent prisonniers de leur propre aliénation. [...] Ainsi la virilité, par l’intermédiaire de son appareil répressif, l’homophobie, doit assurer une protection imaginaire et physique des différentes enveloppes psychiques structurant la virilité. L’homophobie, de par sa fonction socio-psychique "préserve", telle une capote, les hétérosexuels de "la féminité" en empêchant toute forme d’intrusion masculine extérieure. Nous pourrions alors postuler que l’homophobie est constitutive de la psychogenèse de tout individu masculin. » Christophe Gentaz est psychologue clinicien en milieu scolaire et socio-anthropologue
Temps de lecture : ~ 58 minutes
La culture du viol
Si nous interrogions les gens sur ce qu'est pour eux un viol, la définition serait sans doute la suivante : une jeune femme court-vêtue rentrant chez elle tard le soir, violée par un inconnu armé d'un couteau. Nous savons que ces représentations sont fausses mais elles ont profondément ancré nos esprits et il est extrêmement difficile de se sortir de l'esprit cette image pour se rappeler que le viol a davantage lieu dans un lieu privé et par une connaissance.
Temps de lecture : ~ 49 minutes
Gunther Anders
La fin du pacifisme
Günther Anders (né Günther Siegmund Stern) est un penseur, journaliste et essayiste allemand puis autrichien, né en 1902 à Breslau et mort à Vienne en 1992. Ancien élève de Husserl et Heidegger et premier époux de Hannah Arendt, il est connu pour être un critique de la technologie important et un auteur pionnier du mouvement antinucléaire. Le principal sujet de ses écrits est la destruction de l'humanité. Günther Anders a traité du statut de philosophe, de la Shoah, de la menace nucléaire et de l'impact des médias de masse sur notre rapport au monde, jusqu'à vouloir être considéré comme un « semeur de panique » : selon lui, « la tâche morale la plus importante aujourd'hui consiste à faire comprendre aux hommes qu'ils doivent s’inquiéter et qu'ils doivent ouvertement proclamer leur peur légitime ». Il a été récompensé de nombreux prix au cours de sa vie pour son travail, dont le Deutscher Kritikerpreis de 1967 et le prix Theodor-W.-Adorno de 1983. A 85 ans, suite à la catastrophe de Tchernobyl, il renonce à la non-violence et prône la « légitime défense » face au péril nucléaire. Allant jusqu’à affirmer qu’« il n’y a pas d’autre moyen de survivre que de menacer ceux qui nous menacent », les appels à la violence de Gunther Anders choquent et agitent les sphères militantes et intellectuelles, notamment en Allemagne. Ces textes marquent son revirement intellectuel : le premier explique pourquoi le sabotage est devenu selon lui insuffisant, et justifie la violence envers ceux qui menacent la survie de l’humanité ; le second, sous forme d’une interview imaginaire, reprend ce plaidoyé et critique les mobilisations non-violentes, qu’il qualifie de happening.
Temps de lecture : ~ 35 minutes
Diangelo
la fragilite blanche
Pourquoi est-il si difficile de parler de racisme quand on est blanc ? La sociologue américaine Robin DiAngelo a passé vingt ans à étudier cette question dans des ateliers sur la diversité et le multiculturalisme. Elle en a tiré un concept fondamental pour comprendre le rapport des Blancs au racisme : la fragilité blanche, un mécanisme de défense ou de déni qui permet de détourner la conversation, empêchant d’identifier le racisme systémique qui persiste dans nos sociétés. Et donc de le combattre. Le texte est suivi de « 11 conseils pour être un bon·ne alié·e », écrit par trois membres de l’association Lallab
Temps de lecture : ~ 20 minutes
Silvia Federici
La revolution feministe inachevée
Silvia Federici, écrivaine, militante et professeure de l’Université de Hofstra de New York, est une référence pour comprendre l’interconnexion entre la crise systémique actuelle du capital et l’augmentation des différentes formes de violences à l’égard des femmes, en se référant aux analyses féministes de la transition du féodalisme au capitalisme et au rôle du travail reproductif non salarié dans la constitution du système capitaliste. Elle est notamment l’auteure de Caliban et la sorcière. Voici le premier chapitre du livre de Silvia Federici : Point zéro : propagation de la révolution. Salaire ménager, reproduction sociale, combat féministe. 'Mon engagement dans le mouvement des femmes m'a amenée à prendre conscience que la reproduction des êtres humains est au fondement de tout système économique et politique, et que si le monde continue de tourner, c'est grâce à l'immense quantité de tâches ménagères, payées et non payées, effectuées par les femmes.'
Temps de lecture : ~ 53 minutes
Corinne Monnet
La répartition des tâches entre les femmes et les hommes dans le travail de la conversation
En s’appuyant sur de nombreuses recherches sur la communication, ce texte montre comment la conversation, loin d’être une activité anodine et spontanée, est traversée par des rapports de pouvoir. Il s’intéresse particulièrement aux différentes formes que peut prendre la domination masculine dans le domaine de la conversation et permet ainsi de prendre conscience que la lutte contre le sexisme passe aussi et surtout par un changement de nos comportements au quotidien. Cette étude a été réalisée en 1997 dans le cadre des études de genre à Genève. Elle a été publiée dans les Nouvelles Questions Féministes Vol.19 en 1998. Corinne Monnet, féministe radicale, est active depuis plusieurs années dans la mouvance anarchiste et a contribué à plusieurs initiatives féministes non-mixtes.
Temps de lecture : ~ 42 minutes
pierre madelin
la tentation ecofasciste
Alors que la question du « monde d'après » est sur toutes les lèvres et que la crise du capitalisme s'accentue, il nous a semblé important de nous interroger sur ce que pourrait être une politique écofasciste. À quoi pourrait ressembler une alliance entre le « vert » et le « brun » ? Pierre Madelin est un essayiste et traducteur. Il a étudié la philosophie à la Sorbonne avant de devenir traducteur spécialisé dans les 'humanités environnementales'. Depuis 2012, Pierre Madelin vit et travaille à San Cristóbal de Las Casas dans l’État du Chiapas, au Mexique. Il est notamment l’auteur du livre « Après le capitalisme »
Temps de lecture : ~ 35 minutes
Lordon
le capitalisme ne rendra pas les cles gentiment
« La fin de l’histoire est connue : la « démocratie », le parlement, la « loi de la majorité », tout ça finit en bombardement aérien de la Moneda. Et voilà le point de cruauté de la leçon de chose : jusqu’au dernier moment, Allende a voulu croire en la procédure « démocratique », et refusé l’option de la classe ouvrière en armes. Malheureusement, en face, on n’y croyait pas. Moyennant quoi, les armes n’ont été que d’un côté — qui a, logiquement, été vainqueur. Drame classique de la théorie des jeux : celui qui joue la coopération dans un jeu noncoopératif finit comme à la belote : capot. » Frédéric Lordon est économiste et philosophe. Il est notamment l’auteur de Jusqu’à quand ? Pour en finir avec les crises financières, Raisons d’agir, 2008 ; Capitalisme, désir et servitude. Marx et Spinoza, La Fabrique, 2010 ; D’un retournement l’autre, Seuil, 2011 ; La société des affects, Seuil, 2013 ; et Imperium. Structures et affects des corps politiques, La Fabrique, 2015.
Temps de lecture : ~ 31 minutes
Einstein
Le capitalisme voila la source du mal
En mai 1949, Albert Einstein, peu connu pour son positionnement politique, signait un article paru dans le premier numéro du magazine de la gauche états-unienne Monthly Review. Il expliquait pourquoi il choisissait le socialisme plutôt que le capitalisme.
Temps de lecture : ~ 14 minutes
Le franc CFA ou le Colonialisme Monaitaire
« Le franc CFA est une monnaie coloniale. Il constitue de ce point de vue un cas unique dans le monde : l’autre grande zone monétaire coloniale – la zone sterling – n’a pas survécu aux indépendances. Le franc CFA est un cas spectaculaire par son ampleur d’une monnaie dirigée par un pays qui ne l’utilise pas lui-même. Moins au service du développement économique des pays qui l’utilisent que des capitalistes et de la diplomatie françaises, le franc CFA a activement contribué à perpétuer la domination de la France sur quinze États pendant près de 75 ans. Son remplacement par l’eco, annoncé en mai 2020, pour huit des pays qui l’utilisaient, n’implique en aucun cas la disparition du système colonial sur lequel il repose. »
Temps de lecture : ~ 16 minutes
Jean Baptiste Malet
Le systeme Pierre Rabhi
La panne des grandes espérances politiques remet au goût du jour une vieille idée : pour changer le monde, il suffirait de se changer soi-même et de renouer avec la nature des liens détruits par la modernité. Portée par des personnalités charismatiques, comme le paysan ardéchois Pierre Rabhi, cette « insurrection des consciences » qui appelle chacun à « faire sa part » connaît un succès grandissant. Jean-Baptiste Malet, est un journaliste français. Auteur d’enquêtes « au long cours », il collabore au Monde diplomatique. Il a réalisé plusieurs ouvrages et documentaires, dont une enquête sur Amazon (En Amazonie, Fayard, 2013) et une autre sur la géopolitique du concentré de tomates industriel (L’Empire de l’or rouge, Fayard, 2017), traduites en plusieurs langues. Ce dernier a reçu le prix Albert-Londres du livre en 2018.
Temps de lecture : ~ 29 minutes
Schmitt
Les hommes profeministes et leurs amies
« Je me suis demandé pourquoi les hommes hétérosexuels avons les amitiés que nous avons et pourquoi elles ont tendance à jouer un rôle relativement périphérique dans nos vies. Cherchant des réponses à ces questions, j’ai commencé à lire une partie de la volumineuse littérature au sujet des hommes et des femmes hétérosexuel.le.s dans leurs relations, à propos de leur manière de parler (ou de ne pas parler) les un.e.s aux autres. Cette littérature décrit les hommes hétérosexuels comme impassibles, ignorants de leurs propres émotions, et réticents à examiner leurs sentiments ou écouter d’autres personnes exprimer leurs émotions. Les explications de pourquoi ces hommes sont comme cela allaient de théories psychanalytiques sur la manière de grandir des petits garçons à des discours quasi-darwinistes plus ou moins bidons sur l’Homme-Chasseur et la Femme-Mère. Mais rien de tout ça ne semblait s’appliquer à moi et mes amis. Nous sommes tous des hommes proféministes hétérosexuels. Nous ne nous montrons pas de l’affection en nous frappant ou en nous appelant par des noms vulgaires et insultants. [...] Nous ne sommes pas en concurrence constante les uns avec les autres. […] Nous avons appris à écouter et accorder une attention soigneuse et concentrée. Mais nos amitiés les uns avec les autres restent — à quelques exceptions près — distantes, émotionnellement froides, et apparemment non essentielles à nos vies »
Temps de lecture : ~ 42 minutes
Sara Ahmed et Oristelle Bonis
Les rabat joie féministes
Interrogeant la figure de la « féministe rabat-joie », cet article propose d’en explorer la négativité, aussi bien que la capacité d’agir dont elle est la promesse. Il s’agit ainsi, en repositionnant la pensée féministe comme critique de l’injonction au bonheur, de comprendre le sujet féministe en tant que sujet obstiné. L’obstination féministe est alors appréhendée comme le socle incertain d’une politique collective traduisant les émotions individuelles, la douleur ou la colère ressentie face aux injustices. Au-delà, la figure du sujet obstiné permet de saisir la façon dont, au sein des espaces féministes, les femmes noires ont pu être réduites à leur colère et désignées comme cause des divisions engendrées par le racisme. La position de sujet obstiné constituerait ainsi autant un lieu de tensions que de revendications politiques. Sara Ahmed est une universitaire angloaustralienne dont le domaine d’étude comprend la théorie féministe, le féminisme lesbien, la théorie queer, la critical race theory et le postcolonialisme. Elle est considérée comme une figure de la phénoménologie queer. Oristelle Bonis est directrice de publication des Éditions iXe, spécialisée dans le féminisme et ses différentes voix. Elle a été traductrice puis codirectrice de la collection Bibliothèque du féminisme (1991-2009) aux éditions de l’Harmattan.
Temps de lecture : ~ 35 minutes
L’anthroposophie, discrète multinationale de l’ésotérisme
Quoi de commun entre l’agriculture biodynamique, une école à la pédagogie atypique, une grande entreprise de cosmétiques, un investissement dans une ferme éolienne ? Tous sont liés à l’anthroposophie, un courant spirituel fondé au début du XXe siècle par Rudolf Steiner. Discret mais influent, ce mouvement international dispose de relais économiques et politiques… jusqu’au sein du gouvernement français.
Temps de lecture : ~ 38 minutes